quinta-feira, 18 de novembro de 2010

«MAE : la liberté d'expression en question» / Mandado de detenção europeu: a liberdade de expressão em causa

Que faisait Aurore Martin le 21 septembre 2009 ? Elle participait à une conférence de presse à Bayonne. Que faisait-elle le 28 janvier 2007 ? Elle présentait avec d'autres membres de Batasuna une proposition institutionnelle pour le Pays Basque Nord. Et le 30 mars 2007 ? Elle participait à un meeting à Iruñea au cours duquel était présentée une proposition de la gauche abertzale. C'est pour ce type de faits que l'Etat espagnol la considère comme «terroriste» et demande à la justice française de la lui livrer. C'est pour ce type de raisons qu'Aurore Martin vient d'être incarcérée durant une semaine par la justice française. C'est pour ces raisons qu'hier la cour d'appel de Pau, pour la deuxième fois en six mois, se penchait sur un MAE visant la militante de Batasuna.

La lecture des motivations du mandat d'arrêt européen (MAE) lancé par un juge espagnol à l'encontre d'Aurore Martin laisse pantois : les faits reprochés sont une succession de réunions, de manifestations publiques, de conférences de presse ou d'articles d'opinions... Il lui est aussi reproché d'avoir été salariée du Parti communiste des terres basques (PCTV/EHAK).

Cela ne semble pas gêner M. le procureur de la République de Pau qui, à peine audible et ne levant pas le nez de ses papiers, requiert que la cour donne suite au MAE. «Il a été émis de façon régulière». Le magistrat considère aussi que dans le cadre de cette procédure «les Etats doivent se faire confiance». Il rappelle enfin qu'Aurore Martin risquant «plus d'un an de prison, en l'espèce douze» pour appartenance à une organisation terroriste, elle doit être envoyée en Espagne.

«On connaît les prochains»
L'avocate de la militante, Me Rekarte, s'étonne de l'inadéquation entre les faits constatés et les accusations portées. Elle dénonce l'acharnement contre sa cliente, rappelant qu'elle avait été visée par le même MAE en mai dernier. Enfin, elle s'adresse aux magistrats : «Ce que vous décidez aujourd'hui c'est de l'interdiction ou pas de Batasuna sur le territoire français. Si vous donnez suite à ce mandat d'arrêt, il y en aura d'autres. Il y a déjà deux autres noms de membres de Batasuna considérés comme ressortissants français dans les motivations données par la justice espagnole. Vous risquez donc d'ouvrir la porte à une multiplication de ce type de procédures et nous savons déjà qui sont les prochains» affirme-t-elle, rappelant que le parti est légal de ce côté des Pyrénées et qu'il a même des électeurs.

Aurore Martin s'est dite «atterrée» par ce qui lui arrive et affirme refuser d'être «jugée en Espagne pour [ses] activités politiques», que c'est pour cette raison qu'elle a refusé de se rendre devant la justice espagnole ce qui, selon elle, lui aurait valu ce commentaire de la part d'un magistrat : «Vous êtes stupide». La décision sera rendue publique le 23 novembre.

Auparavant, son avocate avait requis sa mise en liberté arguant du fait que sa cliente s'était toujours rendue aux convocations et qu'elle avait pour les mêmes faits en mai dernier été laissée libre sous contrôle judiciaire, contrôle qu'elle avait scrupuleusement respecté. «Les faits reprochés à ma cliente en mai et les garanties de représentation présentées à l'époque sont les mêmes. Je suis stupéfaite qu'aujourd'hui on l'incarcère.» La cour a finalement décidé de libérer la jeune femme.

Nombreux soutiens et salle trop petite
Bien que la mise en scène pour faire penser à une affaire grave (escouades de CRS en tenues anti-émeutes, convoi cellulaire roulant toutes sirènes hurlantes et rues barrées), de nombreuses personnes s'étaient déplacées du Pays Basque afin de soutenir Aurore Martin hier à Pau. L'indignation était palpable dans le public dont une partie n'a pas pu assister à l'audience. En effet, la salle d'audience était trop petite (volonté d'une audience en catimini ou de créer des incidents ?) et les policiers ont fait ressortir une partie du public et la majeure partie des quelques journalistes présents. Si ceux-ci ont pu de nouveau entrer dans la salle, le reste des proches d'A. Martin a dû patienter dehors. Rappelons qu'outre les partis abertzale, la Ligue des droits de l'homme, le NPA ou le député MoDem Jean Lassalle, entre autres, se sont élevés contre le MAE visant A. Martin. Une manifestation aura lieu à Bayonne samedi 20 à 16 heures (départ de la place des Basques).

Giuliano CAVATERRA

Ver também: «Organizações de direitos humanos opõem-se à entrega de Aurore Martin ao Estado espanhol» (Gara)